Terroirs
Par Jean-Paul Burias - Photographies : fournies par les domaines, le 17 juillet 2023
Haut-lieu du tourisme avec des paysages variés des Alpes du Sud au bord de la Méditerranée, la Provence magnifie ses vignobles vallonnés et ses oliveraies avec des offres d’œnotourisme dans des cadres enchanteurs. Tour d’horizon des plus beaux spots provençaux qui produisent aussi d’excellents vins…
La première image ressemble à un écrin superbe et évident où la nature fait des merveilles. Parfaitement niché entre les Alpes et la Méditerranée, le vignoble provençal fascine par ses vignes radieuses gorgées de soleil au milieu des oliveraies. Près de villages typiques, les beaux domaines s’immiscent dans le paysage, comme des lieux incontournables qui invitent à la visite. Les vins de Provence séduisent par leur fruité et leur fraicheur dans les trois couleurs, même si les rosés affirment une référence et un label de qualité réputé dans le monde entier. Dans une région très fréquentée été comme hiver, la vente directe affiche une part importante de l’activité des propriétés viticoles. L’opportunité de capter une clientèle réceptive qui prend plaisir à se déplacer pour un séjour touristique a incité des domaines à développer une activité d’œnotourisme qui combine découverte et dégustation. Ces séjours magnifiques concilient le plaisir des yeux et celui du palais avec des vins agréables et séduisants qui sentent bon le terroir méridional, la garrigue et le soleil, dans une belle diversité.
Entre les gorges du Verdon et la mer Méditerranée, le Château Roubine conjugue vignes, oliviers et lavandes. Bordés d’un cirque de pins et de chênes, ses 130 hectares dont 72 de vignes illustrent une formidable diversité de paysages. Ces conditions privilégiées favorisent la production de vins de haute qualité avec l’atout d’un drainage naturel ou roubine, qui signifie ruisseau en provençal. L’histoire du Château Roubine est liée à celle de la Provence.
Connu depuis le XIVe siècle, il a été la propriété de l’Ordre des Templiers avant d’être cédé à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, puis de passer dans différentes familles provençales. « Notre domaine fait partie des 18 Crus Classés historiques de Provence », explique Valérie Rousselle, propriétaire. « Nous avons la chance d’offrir à nos visiteurs un décor unique de 72 hectares de vignes d’un seul tenant, qui forment un cirque naturel bordé de pins et de chênes-lièges. Nos vins ont toujours eu une singularité particulière, lié à l’usage des vieux cépages provençaux, mais aussi à une méthode de vinification soignée et à des températures contrôlées ».
Riche et varié, le programme d’oenotourisme raconte l'histoire, l'encépagement et les particularités du château, depuis la terrasse du caveau avec vue panoramique sur les vignes. Le visiteur plonge ensuite dans l'univers de la production en passant les portes privées de la cave. Il découvre les secrets de fabrication des Crus Classés en suivant le parcours du raisin, de la réception à la vinification, jusqu'à la mise en bouteille. Ce moment d’exception est suivi par une dégustation commentée des cuvées. Un sentier vigneron permet de découvrir lors d’une balade historique et pédagogique, un terroir viticole unique avec un parcours en treize points qui se calque sur les treize cépages du domaine. « Les clients cherchent de plus en plus des expériences authentiques », reprend Valérie Rousselle. « Nous avons la chance d’être un des plus gros acteurs détenus par une famille provençale et cela fait notre force. Nous essayons de capitaliser au maximum sur le développement durable et les éléments naturels qui font la force du domaine avec une agriculture en biodynamie depuis plusieurs années. Nous avons pour projet de construire un éco-hôtel ainsi qu’un restaurant privilégiant les produits locaux au cœur de nos vignes ».
Au Domaine des Féraud, les plaisirs se révèlent multiples. À la production de vins au caractère élégant, le domaine a élargi sa palette tout au long de l’année par des expériences oenotouristiques. Depuis 2011, ce lieu enchanteur appartient à Markus Conrad et à son épouse Annerose que rien pourtant ne prédestinaient à devenir vignerons. Trompettiste et chef d’entreprise, Markus Conrad a choisi à cinquante ans l’aventure du vin, afin de faire de sa nouvelle activité un art qui réjouit les cœurs et exprime l’harmonie. Au milieu de la magnifique plaine des Maures surnommée la petite Afrique, le sentier des Féraud invite le visiteur à prendre son temps pour flâner dans un superbe écrin de nature qui révèle une biodiversité exceptionnelle.
La mosaïque de couleurs et la diversité des habitats naturels symbolisent un milieu favorable à des espèces patrimoniales remarquables comme la tortue d’Hermann. Ancien chai de production de vin refait à neuf, le caveau de vente dévoile un bel espace contemporain pour la dégustation de vins biologiques dont plusieurs sans sulfites ajoutés. Ce cadre chaleureux et inspirant propose même une terrasse au bord d’une piscine. « L'objectif est de mettre en relation la qualité des vins et celle du lieu », souligne Markus Conrad. « La Provence est une terre de tourisme et la vente directe est souvent très importante pour les propriétés viticoles. Nous élaborons nos cuvées dans l’esprit de l’art de vivre méditerranéen avec des vins frais, fruités, secs et élégants ». La vente directe représente 60% du chiffre d’affaires, grâce notamment à un savant mélange entre la qualité des vins proposés et celle de l’accueil. Deux atouts fondamentaux pour fidéliser les clients.
Au cœur de la Provence verte, le Château Margüi révèle toute la magie de ses lieux. Il appartient depuis avril 2017 à la société Skywalker Vineyards, dont l'actionnaire principal est le réalisateur et producteur américain Georges Lucas
Depuis des milliers d’années, trois sources naturelles nourrissent une terre fertile que les hommes travaillent avec passion. Devant une bastide, la statue d’Ondine, symbolise cette eau, pure et précieuse dans un pays de soleil et de mistral. Les sols argilo-calcaires et les collines arborées donnent aux vignes plantées en coteaux un environnement unique. « Nos vins sont issus de l'appellation Coteaux varois en Provence », décrypte Yann Jouët directeur. « La présence de forêts, de collines et de sources d'eau naturelles leur donne une fraîcheur innée. En 2021, nous avons inauguré une nouvelle boutique de 80m2 à l'entrée du domaine. L'idée est d'accueillir nos clients dans une ambiance conviviale aux pieds des premières vignes du domaine. La dégustation est gratuite ou privatisable avec une capacité de 100 personnes pour les grands évènements ». La boutique a été pensé pour accueillir des groupes avec un grand parking, des espaces et un mobilier finement choisi. Grâce à ces atouts, la vente directe représente 15% du chiffre d’affaires avec de belles perspectives prochaines en termes de fréquentation touristique. « Le château représente un plus commercial grâce à un bon mix de plusieurs facteurs », reprend Yann Jouët. « La boutique apporte un complément d’activité au sein de l’ensemble des réseaux de ventes, le marché national dédié aux professionnels, l’export aux distributeurs et les ventes directes ».
Au pied de la montagne Sainte-Victoire, cette bastide du XVIIIe siècle arbore un esprit moderne tout en gardant un côté typiquement provençal au cœur d'un écosystème unique. Une grande allée bordée de cyprès et lauriers roses conduit le visiteur à une pause lumineuse au creux d’un panorama magique qui a longtemps constitué la source d’inspiration de Cézanne et de peintres impressionnistes. Le blanc de chaux des murs fait écho à la teinte de la montagne proche. Les plafonds se pigmentent aux couleurs vives de Provence avec le vert des oliviers dans l'entrée, le bleu du ciel dans le salon et le jaune des champs de blé dans la cuisine. Sur 80 hectares, la Grande Bauquière partage une relation passionnée au paysage et à un terroir exceptionnel dans une palette de vins de caractères uniques et passeurs d’émotions. « Nos 11 cépages permettent de faire de beaux assemblages tant pour le rosé que pour le blanc, à l’image de la palette de couleurs d’un peintre », précise Dorothée Salat qui a acheté le domaine avec son mari Alain en 2012. « La finesse d'un terroir riche de sa fraîcheur aromatique et une sélection fine de cépages font le style et la singularité de nos vins. Notre site d'accueil revendique la simplicité, l’élégance et une connivence poétique avec la nature ». L’offre oenotouristique donne la possibilité de découvrir l'histoire et le savoir-faire du domaine à travers une décoration recherchée, des planches d'encyclopédie, des outils de la vigne et des plans des parcelles dessinés par l'artiste plasticien Jean Oddes. « Nous avons aménagé un espace extérieur pour recevoir nos clients au creux du panorama de la Sainte-Victoire », reprend Dorothée Salat. « Nous commençons depuis peu à vendre au domaine, et donc l’histoire commence pour nous. Les clients ont pris l’habitude d’aller chez leurs cavistes depuis les confinements. Mais beaucoup désormais, apprécient de venir chez nous pour la beauté des lieux et la qualité des vins, avec un bel équilibre entre ces deux options ».
Dorothée Salat qui a acheté le Château la Grande Bauquière avec son mari Alain en 2012.
Ce domaine mérite bien son nom. Ce château des Vignobles Ghigo respire le vert, niché dans une pinède de plusieurs hectares typiquement provençale. Cadastré dès le XVIIe siècle, il figure parmi les plus anciens de l’appellation Côtes-de-Provence-La-Londe.
Propriété de la famille Ghigo depuis 2010, ce terroir de 40 hectares dont 30 de vignes en agriculture biologique a pour défi de faire de la biodiversité sa priorité. « Le domaine a une situation assez atypique en bord de mer et du fait de l’urbanisation, dans une ville », présente Camille Ghigo, fille de Robert Ghigo. « Notre communication est basée avant tout sur le terroir, la qualité de nos vins, rosés frais et parfumés, blancs délicats et gourmands et rouges fins et harmonieux, et aussi sur le fait que nous sommes un domaine familial à taille humaine. On ressent un retour aux sources. Nos clients réguliers et les touristes recherchent de plus en plus ces valeurs et une histoire en plus de vins de qualités ». L'aménagement des espaces extérieurs et du caveau de vente ont optimisé les conditions d’accueil des visiteurs. L'installation d’un emblème dans la cour attise la curiosité comme une invitation à entrer. La vente directe représente une partie importante des ventes tout en offrant l’opportunité de partager une forte passion pour le métier du vin.
Créée en 2019, la Maison Meï est avant tout une histoire de famille menée par deux passionnés du vin, Benjamin Meï et son cousin Bernard Meï. Le Domaine Saint-Jean est une des premières pierres de cette marque avec un environnement d'exception autour d’une bastide historique située entre le massif du Luberon, la vallée de la Durance et la mer Méditerranée. Le climat méditerranéen caractérisé par des étés chauds et secs et des hivers doux et humides, la présence du mistral, un vent fort et sec, sont autant d’éléments qui favorisent un vignoble sain et facilement exempt de maladie.
Le domaine est précurseur dans la mise en œuvre de nouveaux concepts comme l’agroforesterie, la permaculture, l’agroécologie et le couvert végétal qui limite le travail du sol et permet de conserver l’humidité naturelle du matin. Très aromatiques, les vins se distinguent par leur fraîcheur tout en respectant l'expression des terroirs. Le projet de développement s’appuie sur la construction d’un chai de vinification de 1700m² doté d’une capacité totale de vinification de 10 000 hectolitres. Il inclut une salle de micro-vinification en amphores et barriques. L’aménagement de la bastide en caveau de vente est porté par la création d’un lieu d’organisation d’évènements avec possibilité d’hébergement afin de consolider l’offre oenotouristique. « Nous sommes aux portes du Parc naturel régional du Luberon, une des régions les plus visitée du midi de la France », explique Benjamin Meï. « Notre situation à 25 minutes d’Aix-en-Provence et 40 minutes de l’aéroport international Marseille-Provence nous rend accessibles aisément. La construction d’un nouveau chai sera suivie du renforcement de l’offre oenotouristiques fin 2024. L’objectif est d’être au cœur de la mise en valeur et en lumière des vins du Luberon ». L’œnotourisme représente un facteur de croissance. Cette stratégie s’avère gagnante avec 15% des ventes en France et 85% à l’export. La récente acquisition du Château La Gavede complète cette volonté de croissance.
L'histoire du Château Paquette est liée à celle de sa famille tombée sous le charme d'un lieu unique en 1952. Caché dans la pinède, le vignoble semble comme posé sur la roche volcanique de l'Estérel, bercée par les embruns marins. Le domaine accueille les visiteurs pour une plongée naturelle dans les vignes. De retour au caveau, une dégustation commentée des vins est animée par l’équipe du château pour un moment de plaisir et de convivialité.
Une terrasse ombragée garantie des conditions optimales pour déguster une planche apéritive gourmande accompagnée d'un verre de vin. « Tout mon travail consiste à rechercher ce qui pourrait être selon moi la meilleure expression du terroir avec des engagements environnementaux forts », considère Jérôme Paquette. « Pour parvenir à cette quête, je cherche à être le moins interventionniste possible et à laisser parler le raisin. J'aime que les millésimes soient différents car ils varient. Je revendique le statut de vigneron artisan ». La cave est restée à l’identique, liée à son histoire construite depuis trois générations. « Le plus important est la qualité de l'accueil », reprend Jérôme Paquette. « Chaque visiteur peut prendre le temps de déguster nos vins en s'installant sous les platanes comme sur une place de village. Nous aimons les accueillir avec un petit bouquet d’helichrysum ou immortelles, surtout quand ils viennent de loin en avion et qu'ils ne peuvent ramener de bouteilles chez eux. Ils gardent au moins ce souvenir et il en reste toujours quelque chose ».
Les visiteurs du Château Paradis sont vite saisis par le poids de l’histoire. Les premières plantations de vignes sur ses terres datent de -600 avant J-C lorsque les Phocéens s’implantent à Marseille. Par la suite les Romains ont bâti la Villa Regina et un établissement agricole avec un pressoir à raisin. Les terres du château ont été cédées à différents propriétaires au fil du temps, mais elles ont toujours gardé ce lien avec la culture du vin. Attachés à leurs racines provençales, Xavier et Odile Thieblin visent à magnifier le domaine et à créer des vins de terroir avec une vraie personnalité depuis leur acquisition en 2011.
Un sentier vigneron balisé avec une jolie vue panoramique sur le Luberon et des dégustations commentées, participent à l’attractivité du domaine. « Nos vins riches en arômes, frais et élégants expriment notre terroir et notre savoir-faire », analyse Odile Thieblin. « Cette offre est valorisée par un cadre naturel préservé et un caveau entièrement vitré face aux vignes. Ces éléments participent à une expérience client qualitative portée par un accueil authentique dans l'esprit de la maison ». Le tourisme revient en force après l’arrêt dû à la crise sanitaire. Dans ce besoin de retour à la nature et à l‘évasion, l'œnotourisme se développe. « Les Français découvrent ou redécouvrent leur territoire », développe Christine Pautut, responsable œnotourisme. « Nous avons par ailleurs une belle fréquentation d’étrangers qui affectionnent la Provence et le patrimoine gastronomique et viticole français. Ils viennent pour la qualité du vin et pour notre accueil. Ce plus commercial est un atout complémentaire pour valoriser notre production. »
Dans un décor splendide, le Château de Fonscolombe procure une expérience hors du commun qui combine dans une belle unité, un séjour dans un hôtel de luxe et la visite d’un domaine viticole connu pour son excellence. La partie hôtelière est conçu comme une vaste maison où tous les espaces se rejoignent en un esprit de famille qui préserve toutefois l’intimité de chacun. Ce vignoble de référence prend racine à la période romaine.
Son terroir très minéral et le climat imprègnent des vins au nez fin et fruité dans les trois couleurs. « Le caveau de vente est très bien situé dans la vallée de la Durance et nous avons communiqué dans ce sens », précise Sylvie Hanicotte, responsable de la cave. éDes aménagements sont en cours avec la construction d’un nouveau chai et d’un caveau de vente. Les visiteurs viennent pour la qualité des vins et leur prix. Le pourcentage des ventes en direct est de 60 % avec une activité constante ».
Le plus ancien vignoble de France bénéficie désormais d’une belle côte de popularité. Avec un volume à l'export en plein développement, la Provence s’est imposée comme le premier producteur mondial de rosés tout en offrant des belles potentialités en blancs et en rouges. Les domaines ont habilement développé leur production avec de vraies perles de terroir, à faible rendement, très travaillées, grâce à une maîtrise des techniques de vinification. Comme aimanté par ces éléments, le vignoble, assis sur des massifs anciens, rocheux et durs, vit en harmonie avec le climat méditerranéen. La production de vins équilibrés et élégants avec des tannins serrés, constitue une offre majeure au cœur d’un cycle vertueux qui inclue un tourisme qui se développe toute l'année. « Nous n’avons pas besoin d’artifices pour créer un accueil », conclut Jérôme Paquette du Château Paquette. « Beaucoup de domaines connaissent une jolie progression dans leur activité d’œnotourisme, aussi parce que la crise sanitaire nous a obligé à nous réinventer. Je ne connais pas de bons vins produits dans des vignes moches. C’est pour cela que je propose avec fierté mes vins que j'espère bons sur un site engageant et je l’espère inoubliable ». Une alchimie entre beauté des paysages et des domaines et qualités organoleptiques des vins, qui constituent des atouts inestimables.
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